vendredi 22 janvier 2016

"D'ailleurs, les poissons n'ont pas de pieds" Jon Kalman Stefansson

«Elle est plus belle que tout ce qu’il a pu voir et rêver jusque-là, à cet instant, il ne se souvient de rien qui puisse soutenir la comparaison, sans doute devrait-il couper court à tout ça, faire preuve d’un peu de courage et de virilité, pourtant il ne fait rien, comme s’il se débattait avec un ennemi plus grand que lui, plus fort aussi, c’est insupportable, il serre à nouveau les poings, récitant inconsciemment son poème d’amour. Elle s’en rend compte et lui dit, si je dénoue mes cheveux, alors tu sauras que je suis nue sous ma robe, alors tu sauras que je t'aime.»
Ari regarde le diplôme d’honneur décerné à son grand-père, le célèbre capitaine et armateur Oddur, alors que son avion entame sa descente vers l’aéroport de Keflavík. Son père lui a fait parvenir un colis plein de souvenirs qui le poussent à quitter sa maison d'édition danoise pour rentrer en Islande. Mais s’il ne le sait pas encore, c’est vers sa mémoire qu’Ari se dirige, la mémoire de ses grands-parents et de leur vie de pêcheurs du Norðfjörður, de son enfance à Keflavík, dans cette ville «qui n’existe pas», et vers le souvenir de sa mère décédée.
Jón Kalman Stefánsson entremêle trois époques et trois générations qui condensent un siècle d’histoire islandaise. Lorsque Ari atterrit, il foule la terre de ses ancêtres mais aussi de ses propres enfants, une terre que Stefánsson peuple de personnages merveilleux, de figures marquées par le sel marin autant que par la lyre. Ari l’ancien poète bien sûr, mais aussi sa grand-mère Margrét, que certains déclareront démente au moment où d’autres céderont devant ses cheveux dénoués. Et c’est précisément à ce croisement de la folie et de l’érotisme que la plume de Jón Kalman Stefánsson nous saisit, avec simplicité, de toute sa beauté"(quatrième de couverture)

Cette photo est si belle et le titre si étrange que le seul moyen d'en savoir plus est sa lecture...
De suite, le lecteur est parachuté en Islande, "le ciel est bas et lourd, les nuages sombres étouffent la clarté hésitante de décembre et la lave est noire de nuit des deux côtés du boulevard de Reykjanes"page 15. Nous découvrons l'Islande du côté de Keflavik.
Ari, un natif de ce pays, va tenir le rôle principal . Le narrateur est un cousin, un proche d'Ari mais nous n'en saurons pas plus.
Donc Ari revient "avec le coeur brisé, au terme d'un séjour de deux ans au Danemark,pays qu'on ne saurait à proprement parler considérer comme l'étranger" page 23.
Son père lui a envoyé quelques effets, éléments déclencheurs de son retour,une décision pas facile à prendre.
Avec le narrateur, on va suivre Ari dans le temps...Durant son adolescence, ses petits boulots ,la poésie, l'histoire de sa famille,l'histoire de l'Islande...
Le temps n'a pas d'importance avec Jon Kalman Stefasson...Le lecteur lui fait confiance pour l'embarquer à toutes les époques où cette Islande, rude , livre ses secrets de survie face aux conditions climatiques et au fait qu'elle soit une ile..."comme si l'Islande se résumait à peu près à l'armée Américaine,à ces étendues de pierre ponce rugueuse,à des landes désolées et à Keflavik,l'endroit le plus noir du pays,butin de guerre de tous les vents"page 404.
Le texte, avec la traduction d'Eric Boury, est si poétique que je n'ai pas envie d'en parler mais juste de le citer tout le temps. L'auteur est amoureux de son pays et de ses habitants : ce roman est une ode à l'Islande. C'est merveilleux de lire ces mots qui glissent sous nos yeux avec tant de force et d'énergie que vous vous dites, là je lis un très grand roman... Je suis fière d'avoir choisi cette lecture. Sa force a laissé des traces en moi, c'est sûr.
C'est ce genre de roman qui se déguste comme un bon chocolat chaud crémeux, onctueux et de caractère au coin du feu quand le vent souffle à l'extérieur.Et une fois n'est pas coutume, j'ai pris le temps de l'apprécier car chaque page est une pépite.
Je vais continuer à lire Jon Kalman Stefansson. Son Islande m'a fasciné et je lui dis merci.
Je remercie donc
 #MRL15 #PriceMinister.

Voici d'autres avis sur ce roman chez Babelio


Mon appréciation est de 17/20